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Interview Manuel Marquès par Fred Gabiot

 

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"Maigre Pitence"
(collection Manu Marquès)

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- Nom : Marquès
- Prénom : Manuel
- Date de naissance : 15 juillet 1964
- Taille : 1.75 m
- Poids : 60/61 kg
- Métier : Professeur d'EPS à Melun
- Sponsors : Aucun
- Chaussons utilisés : Sportiva Miura

"Hommage aux pieds nus" (collection Manu Marquès)

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- Depuis combien de temps grimpes-tu ?
  J'ai commencé à grimper tardivement, à 20 ans.

- Qu'est ce qui fait pour toi de l'escalade un sport à part ?
  J'ai toujours aimé les sports "gymniques", où il faut jouer avec son corps sans avoir recours à
  une autre personne. De même, j'apprécie la combinaison du risque et de l'esthétisme que l'on
  peut percevoir, sentir, comme au plongeon, en gymnastique et évidemment en escalade.
  J'aime les "problèmes sportifs", le plaisir que l'on peut éprouver à les résoudre. En ce sens,
  grimper dans un passage connu ou facile ne m'intéresse pas, ne me motive pas (ou très peu).
  Il y a aussi évidemment le plaisir de découvrir de nouveaux paysages, de nouveaux lieux. Je
  me lasse très vite d'un site s'il n'y a plus rien à y découvrir....

- Fais-tu des compets et qu'est-ce que cela t'apporte ?
  Je ne pratique pas la compétition (je suis un peu trop "vieux" et c'est toujours délicat avec une
  vie de famille) bien que je l'apprécie grandement. Je l'ai beaucoup pratiquée dans d'autres
  sports avant de connaître l'escalade (escrime, judo, natation, water polo, boxe française).

- Combien de fois grimpes-tu par semaine ?
  Je grimpe trois à quatre fois par semaine par petites "séquences" de 2 heures faute de temps
  (enfants, travail, travaux dans la maison). L'idéal serait, me semble t-il, trois demi-journées
  complètes.

- Suis-tu un programme d'entraînement spécifique ?
  Je ne peux pas me fixer un programme d'entraînement car avec la triptyque précédente c'est
  suffisant pour mon corps. J'essaie cependant d'alterner les "styles" d'escalade (dalle, surplomb,
  mur technique, jeté) et je m'efforce de courir de temps en temps. Cette année je compte
  effectuer un footing une fois par semaine. Cela me parait très nécessaire sachant que
  l'escalade est un activité essentiellement axée sur la force. Pour récupérer rapidement de la
  force il faut aussi être endurant.
  Si je n'ai pas d'entraînement précis j'ai par contre un principe d'entraînement : l'éclectisme des
  efforts ! J'évite que mes muscles s'habituent aux mêmes "contraintes" sinon ils "s'endorment".

- Pratiques-tu d'autres sports ?
  Je n'ai plus le temps de pratiquer d'autres sports.

- Quelle type de grimpe préfères-tu et pourquoi ?
  Je ne préfére pas une forme d'escalade à une autre puisque je "fonctionne" essentiellement au
  problème soulevé par le caillou et à sa beauté. En été je pratique la montagne (veille voie, voie
  avec un équipement moderne, couloir), la falaise et le bloc.

- Y-a t'il un plaisir différent à ouvrir ou à répéter un bloc ?
  Le plaisir que j'éprouve davantage après une ouverture c'est de voir que le passage est apprécié
  par les autres grimpeurs. Le signe révélateur est la présence continuelle de magnésie.
  Une ouverture qui tombe dans l'oubli c'est comme un tableau dans une galerie que personne ne
  regarde. C'est un peu triste.

- Comment t'organises-tu quand tu travailles spécifiquement un bloc dur ?
  Pas d'organisation particulière pour un bloc dur. J'essaie d'y aller régulièrement et si possible
  sans les enfants. Faute de temps et comme je m'ennuie dans les repos (car généralement je
  grimpe seul) les essais sont souvent très rapprochés (et parfois de trop...).

- Est-ce difficile de côter et pourquoi ?
  Il y a des données objectives pour côter un passage (l'inclinaison, la longueur du passage, le
  nombre de mouvements et de points de repos, l'éloignement des prises,etc...). Cela permet de
  différencier un 4 d'un 5, un 7 d'un 8. Après, pour affiner la cotation, c'est l'impression générale,
  la difficulté (au sens large) ressentie qui permet(trait) de faire des nuances entre les blocs. Les
  conditions météo, l'état de forme, l'éventuelle convenance des mouvements à effectuer avec le
  "style" du grimpeur et d'autres données - notamment celles d'ordre psychologiques (difficulté
  "espérée" de l'ouvreur, difficulté annoncée,etc...) - font varier les sensations perçues en sortant
  du bloc. Quoi que l'on dise côter sera toujours une tâche délicate à effectuer puisque la mesure
  ne sera jamais totalement objective.

- Fais-tu de la falaise et quels sont tes sites préférés ?
  J'ai beaucoup pratiqué la falaise quand j'étais étudiant. Nous partions à toutes les vacances.
  Maintenant je n'y vais pratiquement plus et c'est avec grand regret. L'été, lorsque je pars en
  famille à Ailefroide j'ai des difficultés à trouver des personnes d'âge similaire et désirant grimper
  dans le 7c-8a.

- Eprouves-tu des problèmes à transférer tes qualités en falaise et pourquoi ?
  J'ai peu de difficultés à transférer mon escalade bleausarde à la falaise. Après quatre ou cinq
  voies je retrouve l'essentiel des automatismes et des stratégies spécifiques à la falaise. Je n'ai
  pas peur de la hauteur et même si je n'aime pas voler j'oublie l'éventualité de la chute lorsque je
  suis dans une voie difficile.

- T'es-tu souvent blessé ?
  Pratiquement jamais blessé sauf cet été où je me suis fais une déchirure derrière le genou en
  grimpant dans un plafond (lors d'une torsion du genou imposé par le mouvement avec un
  coincement en talon-pointe).

- Qu'est-ce qui te motives plus que tout en escalade ?
  Ce qui me motive en escalade : la difficulté, le "challenge" dans une ambiance saine c'est à
  dire où chacun se respecte, quels que soient les niveaux et les motivations.

- Cite des blocs qui t'ont le plus marqué :
  "Les chiens de paille" pour son aspect complet, "La Merveille" pour son ampleur, et j'en oublie
  d'autres.
  Je suis surtout impressionné par d'anciennes réalisations bien en avance pour l'époque (celles
  de Jacky dans "Big boss", dans "C'était demain", "Le pendule de Foucault", dans "Sonates
  d'automne") et de certaines plus récentes ("l'Insoutenable légèreté de l'être" par exemple).

- Un mot pour finir ?
  Restons vigilant sur l'utilisation de la magnésie notamment dans le marquage des prises.
  Il me semble que les petits points blancs et les grands traits diminuent considérablement la
  difficulté du passage. C'est une aide importante que je considère comme une forme de tricherie.
  Le dixième de seconde nécessaire pour trouver la prise, pour la "fixer" visuellement, pour
  monter et gainer le bassin peut provoquer la chute et ainsi augmenter les essais.
  J'ai été scandalisé lorsque je suis allé voir "Hotline" à la Dreï Zinnen à sa "sortie" et des
  nouveaux blocs à la mode. Il était tout blanc même le bac de sortie ! C'est un bloc assez
  technique avec des "pièges" et son déchiffrage a été grandement facilité. Mon plaisir de
  découvrir, de chercher, a été saboté par des grimpeurs sans respect des autres.
  Enfin, que certains (qui donc ?) arrêtent d'améliorer certaines prises ("Insoutenable légèreté de
  l'être" par exemple).


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